Tandis que les cas de blackface se multiplient en France, l’affiche de la 8e édition du film fantastique à la Réunion a provoqué un tollé. En cause : la mise en scène de deux créatures féminines siamoises nues et grimées en noir, des nids d’oiseau en paille en guise de chevelure et un œuf dans leurs mains. Blackface pour les uns, œuvre artistique pour les autres ; si elle s’est excusée publiquement pour apaiser les tensions, l’artiste Aurélia Mengin, directrice du festival Même pas peur, s’est cependant défendue de toute intention raciste et affirme un choix purement esthétique.
Dans le film «Agathe Cléry», Valérie Lemercier joue le rôle d’une femme blanche raciste atteinte d’une maladie qui rend sa peau noire… Un cas de blackface qui avait déjà mis les cinéphiles mal à l’aise puisqu’au fur et à mesure du noircissement de sa peau, Valérie Lermercier devient meilleure danseuse et plus ouvertement sexuelle, deux clichés fréquemment associés à la femme noire. Des associations psychologiques pour le moins malvenues!
En 2013 , une rédactrice beauté du magazine ELLE France crée le malaise aux États-Unis en apparaissant grimée d’une peinture sombre avec une perruque afro sur fond de motifs africains. (1) Se peindre le visage en noir, renvoie à la pratique du «blackface» et donc à une représentation des personnes de couleur comme étant des personnages débiles et grossiers.
En France, les cas de blackface se multiplient -15 en moins d’un an selon le CRAN_. Même le très sympathique Griezmann s’y est mis en publiant une photo de lui grimé en noir et déguisé en joueur de basket de l’équipe américaine des Harlem Globetrotters. Il a toutefois présenté ses excuses après avoir réalisé que son geste avait heurté au-delà de la communauté noire.
A ceux qui se demandent quel est le problème avec le blackface, un retour en arrière s’impose. Comme l’écrit le journal Les Inrocks en effet, « En se recouvrant le corps de peinture foncée afin de ressembler à un joueur noir de la NBA, Griezmann place au rang de simple déguisement une pratique historiquement associée au racisme. » Née au XIXème siècle, cette pratique s’est popularisée alors que sévissait la législation Jim Crow aux États-Unis, plus communément appelée « lois de ségrégation raciale ». Les « minstrels shows », un genre théâtral dans lequel les comédiens blancs incarnaient tous les stéréotypes associés aux personnes noires, faisaient fureur. le plus célèbre de ces personnages, Jim Crow, a donné son nom aux lois qui ont justifié la ségrégation.
Thomas D. Rice en Jim Crow, en 1832