Splendeurs et misères du cheveu afro

On attribue à la fin des années 60 les années fastes du défrisage et c’est une erreur. C’est bien plus tôt, au XIXème siècle, que les femmes afro-américaines -et les hommes- cédèrent aux pressions d’une société plus à même d’accepter l’intégration de noirs à cheveux lisses. Retour en images.

Nous sommes toujours étonnées à Fossette Magazine de lire encore aujourd’hui sur les réseaux sociaux, des commentaires s’étonnant que les femmes noires et métissées aient tant de mal à assumer leurs cheveux. Comme si cela pouvait aller de soi après l’injonction silencieuse mais tangible de la société (Les coiffeurs qui s’étranglent devant votre masse bouclée ou crépue en vous demandant, à vous, ce qu’ils vont bien pouvoir en faire, le règne du cheveu lisse dans les magazines et les médias généralistes,etc.) de discipliner leurs cheveux. Ce qui leur permettrait par ailleurs de ne plus s’entendre dire:  « Ça a l’air si doux, on dirait de la laine de mouton vos cheveux! », ou d’espérer ne plus susciter de : « On va vous la compter, cette coiffure afro ».

Comment ne pas comprendre alors, que des femmes et des hommes puissent avoir d’avoir cédé aux sirènes du défrisage et ce, dès la fin du XVIIIe siècle. Pour les femmes noires émancipées en effet, telles le médecin Georgia E. Patton, médecin et missionnaire ou Sadie TM Alexander, première afro-américaine docteur en économie et nommée Procureur de la ville de Philadelphie, le défrisage va de soit. Si elles veulent se faire accepter, aussi hautes soient leurs compétences, ces femmes brillantes doivent se rapprocher le plus possible du modèle occidental.

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Et les hommes n’y coupent pas; Malcom X s’en désolait d’ailleurs, d’autant que le grand James Brown,  le chanteur Chuck Berry ou encore Muddy Waters (qui a inspiré la fameuse banane d’Elvis Presley), portaient les cheveux défrisés et gominés.

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On peut alors imaginer que les acteurs noirs-américains ont été eux aussi amenés à surfer comme le citoyen lambda sur la vague du lisse. Ainsi les actrices, Lena Lorne, Ruby Dee, Dorothy Dandridge qui forme avec Harry Belafonte, l’un des couples les plus sensuels du grand écran apparaissent avec des chevelures aux boucles parfaitement disciplinées.

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Mais la fin des années disco marque la fin de cette pratique capillaire. Touchées de plein fouet par les tensions sociales qui sévissent à cette époque, les femmes afro-américaines adoptent peu à peu les codes de beauté occidentaux. Arrivent alors une multitude de techniques de défrisages et la mode des tissages. Beaucoup de femmes -et d’hommes- aux cheveux crépus ont intégré qu’il fallait tresser, mettre des extensions, raidir et même si le retour aux cheveux naturels, s’affirme de plus en plus (La ligne Mizani, gamme de produits capillaires L’Oréal a d’ailleurs choisi comme égérie Inna Modja à l’évidente coiffure afro), rien n’est gagné. Ainsi, quand, il y a deux ans Angelina Jolie laissait sortir sa fille Zahara « les cheveux non peignés » selon la presse (comprenez; naturels), elle défrayait la chronique. Pour être critiquée, quelques mois plus tard, pour lui avoir posé des rajouts! C’est dire si les cheveux afros peuvent faire perdre la tête!

 

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