Bars à câlins, bars à patins?

Par Laurence Peyrin

Et cet hiver qui n’en finit plus… Les gants jusque-là, les écharpes qui te verrouillent à triple-tour, les chaussettes rigides et les tricots de peau, on va dire que c’est pas la saison la plus sensuelle de l’année.

Amie lectrice, tu as envie de te sentir légère, légère comme un rouleau de printemps, et bien roulée pareil? Eh ben claque ton treizième mois dans un billet d’avion pour Tokyo, et rends-toi au Soineya Cuddle Café – littéralement «le bar du dormir ensemble et du câlin», ah, ces Japonais et et leurs haïkus… – où on te cuisinera aux petits oignons.

Ouvert en 2012 dans le quartier branché d’Akihabara (pas dans un bouge, donc), l’établissement n’est pas un bordel, non non, mais une boutique de «co-sleeping», nuance qui ne se mesure probablement qu’en centimètres. Pour le reste, c’est tout pareil: les jeunes filles sont en nuisettes, et les clients exclusivement masculins. On ne précise donc pas qui est le rouleau de printemps dans l’histoire.

La carte est tout à fait correcte: de la simple étreinte de quelques minutes à une nuit entière passée aux côtés d’une hôtesse, avec un supplément pour un échange de regards ou un massage des pieds, les prestations respirent la poésie.

Evidemment, cela n’a pas échappé aux Américains: sur le modèle japonais, des bars à câlins ont déjà ouvert dans le Colorado ou en Californie, mais la législation du Wisconsin est tombée sur le râble de la dénommée Hannah Rode, accorte proprio de la Snuggle House, qui emploie à Madison cinq câlineurs – dont curieusement quatre d’entre eux sont des bimbos d’une vingtaine d’années.

Oh mais dites-moi, a percuté le maire, ça ne serait pas de la prostitution, tout ça? Mais-non-pas-du-tout, se récrie Hannah Rode, qui a visiblement fait des recherches sur le sujet: «Une étreinte de quelques secondes suffit à libérer de l’ocytocine dans votre corps, dans votre cerveau, ce qui a des effets puissants sur la réduction du stress.»

Même si cette définition en évoque une autre, on peut tout de même accorder le bénéfice du doute à Hannah: la dame est à ce point convaincue des effets thérapeutiques du câlin de base que sa Snuggle House vise d’abord les personnes âgées et les malades. Bon. Ceci dit, même si on est en pleine santé et pourvue d’un solide sens de l’auto-dérision, on peut aussi profiter des services du seul câlineur professionnel sévèrement burné de la maison: Lonnie Johnson, yeux christiques sur barbe en angora, coiffé pareil que Beyoncé. Si c’est ça la caution anti-sexe du bar à câlins, sûr que la proprio gagnera tous ses procès.

 

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